Ils fuient la guerre, la persécution, la misère. Venus du Pakistan, de Somalie, de Guinée ou encore du Burundi, près de 1 000 réfugiés et demandeurs d’asile vivent aujourd’hui à Madagascar. Un chiffre en hausse notable depuis la période post-Covid, selon les données du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (UNHCR). Mais dans un pays où leur existence reste largement invisible, comment ces âmes en quête de sécurité survivent-elles au quotidien ? Plongée dans leur réalité, loin des regards.
Ils vivent majoritairement dans les quartiers discrets d’Antananarivo, cherchant l'anonymat. C'est le cas de cette mère célibataire, originaire de Guinée, arrivée sur la Grande Île il y a 17 ans avec son mari. Aujourd'hui seule avec ses quatre enfants, abandonnée par son époux, elle se bat sans aucun soutien formel, subsistant grâce à un petit commerce informel. Son témoignage est poignant.
« Ce n'est pas facile d'être réfugiée à Madagascar, je suis ici depuis 17 ans maintenant. Le problème est que, même à l'hôpital, le prix pour les réfugiés et les étrangers n'est pas le même que pour les Malgaches. Si la consultation coûte par exemple 5 000 Ar, c'est entre 7 500 et 10 000 Ar pour nous. Ma fille est en classe de seconde, on leur demande de faire des stages. Mais si elle se présente dans une entreprise ou un hôtel pour travailler ou faire un stage, on lui refuse, en disant qu'elle n'est pas Malgache et qu'elle n'en a pas le droit... Moi je pense que tous les êtres humains sont égaux, mais ici c'est le contraire... Je fais de petits commerces, c'est très difficile pour moi de vivre, avec les enfants, » explique-t-elle.
La survie sans statut ni ressources
Même combat pour cet homme, originaire du Burundi, qui a fui la guerre en 2015. Aujourd’hui, il survit sans emploi ni papiers officiels valides. Son désespoir est palpable. Selon lui, « avec mon statut de réfugié, j'ai vraiment frappé à beaucoup de portes ici, en vain. Avec mes papiers, ils n'acceptent pas. Je n'ai pas de passeport, ils demandent des casiers judiciaires, etc. Donc pas moyen de travailler. La vie est très dure, je dépense beaucoup... je ne travaille pas, la santé aussi est un problème, on ne peut pas se la payer. Je suis vraiment très fatigué. »
Face à cette précarité, le CDA (Conseil de Développement d’Andohatapenaka), en partenariat avec l’UNHCR, prend en charge l’identification et l’accompagnement des réfugiés sur le territoire malgache. Onja Andriamilanto, responsable de la protection au niveau de l'UNHCR, explique le processus initial : « Lorsqu’ils arrivent ici, nous les recevons pour un petit entretien, afin de comprendre ce qui les a poussés à fuir leur pays. Ensuite, ils sont enregistrés dans notre base de données et reçoivent un certificat — un document légal qui remplace un passeport. C’est ce qui les distingue des migrants en situation irrégulière. »
Malgré les actions menées par ces organisations, la population malgache reste malheureusement peu informée sur la situation de ces hommes, femmes et enfants qui ont tout laissé derrière eux, espérant trouver une vie digne à Madagascar.
Nour Nandrasana et Ravo Andriantsalama