Entre la prise de pouvoir d’une institution régionale majeure et des scandales retentissants, la fin de semaine dernière a été mouvementée pour la diplomatie malgache. Si les dirigeants se félicitent de leurs succès diplomatiques après l’accueil de plusieurs chefs d’État en visite officielle et l’organisation d’événements d’envergure comme les sommets de la COI et de la SADC, de nouvelles controverses viennent fragiliser cette dynamique.
L'année 2025 s'annonce comme une période décisive pour la diplomatie malgache. Rythmée par des succès éclatants sur la scène internationale, notamment avec la visite des présidents français et slovène, elle franchit un cap important avec l'accueil de deux grands sommets : celui de la Commission de l’Océan Indien (COI) et celui de la Communauté de Développement de l’Afrique Australe (SADC). Cependant, plusieurs controverses récentes pourraient potentiellement freiner cette dynamique positive et exige une gestion attentive pour préserver les relations internationales du pays.
La «pseudo-altercation » avec l’Union européenne
Le premier incident est la "pseudo-altercation" avec l'Union européenne. La ministre des Affaires étrangères, Rafaravavitafika Rasata, a expliqué lors d'une intervention sur la chaîne nationale ce week-end avoir eu un entretien avec l'ambassadeur de l'Union européenne, Rolland Kobia. Selon ses dires, cette rencontre lui a permis de rappeler au diplomate que "Madagascar est un pays souverain et qu’il est libre de conclure des partenariats avec les pays de son choix." Bien que l'entrevue de vendredi se soit tenue à huis clos, Rolland Kobia affichait un large sourire à sa sortie. "C’est toujours un plaisir de discuter avec Madame la Ministre pour faire avancer les choses", a-t-il déclaré au micro de la chaîne nationale.
La raison de cette convocation : une publication de l’ambassadeur sur les réseaux sociaux, le 20 juillet dernier. Dans celle-ci, il affirme que « l’Union européenne ne fournit pas de voitures de luxe, mais met à disposition des avions et des hélicoptères pour assurer une aide structurelle aux populations isolées de Madagascar. » Ces propos semblaient répondre indirectement au don de 16 véhicules de luxe par la Chine en marge du sommet de la SADC.
L’incident des Boeing 777 en Iran
Le 23 juillet dernier, un site étranger publie que cinq Boeing 777 immatriculés à Madagascar (préfixe 5R) ont atterri discrètement en Iran le 15 juillet. Rinah Rakotomanga, ancienne directrice générale de l’Aviation Civile de Madagascar (ACM) et ex-directrice de la communication de la Présidence de la République, a réagi quelques jours après. Elle a attaqué le ministre des Transports Valery Ramonjavelo et ancien secrétaire général de la présidence, qu’elle qualifie de « mon ancien ami » dans une publication sur Facebook. Selon elle, le ministre aurait eu recours à des manigances pour obtenir des certificats d’immatriculation provisoires (CIP) et des certificats de navigabilité (CDN) pour cinq avions destinés à l’Iran.
« Moi, je voudrais poser une question et le ministre, mon ancien ami, devrait y répondre : pourquoi as-tu forcé l’ACM à délivrer ces CIP et CDN provisoires ? » fustige l’ancienne directrice de l’ACM. Valery Ramonjavelo est resté silencieux face à ces accusations. De son côté, l’ACM a apporté des explications dans un communiqué officiel, avant d’intervenir sur la chaîne nationale. Selon les responsables de l’Aviation Civile, la société UDAAN Aviation avait obtenu un Certificat d’Immatriculation Provisoire, uniquement pour permettre le transfert de ces appareils vers un atelier de maintenance agréé au Kenya, avec une validité limitée à la date du 17 avril 2025.
L’ACM révèle cependant que la société a modifié illégalement ce document pour prolonger sa validité jusqu’au 12 juillet 2025 et que ces documents falsifiés ont ensuite été utilisés à l’étranger, notamment auprès de l’Autorité de l’Aviation Civile du Cambodge. Face à ces irrégularités, l’ACM a déclaré avoir déposé une plainte pour faux et usage de faux pour identifier les véritables propriétaires et responsables. Cette affaire, si elle perdure, pourrait devenir un obstacle majeur pour la diplomatie malgache, qui connaît pourtant un essor notable depuis le début de l'année.
Avec le lancement des activités liées au 45ᵉ sommet de la SADC aujourd’hui, la diplomatie malgache est plus que jamais sur un fil. En attendant, l’ensemble du pays peut tirer profit des retombées économiques, sociales et touristiques liées à cet événement.
Ravo Andriantsalama