Harijaona Andriamoraniaina, directeur exécutif du mouvement Rohy partage son avis sur le fait que le gouvernement, lors du dernier conseil des ministres a choisi de ne pas procéder à une loi de finances rectificative (LFR). Selon lui, la LFR ne doit pas être systématique vue que c’est une situation d’exception.
Studio Sifaka (SS) : Pourquoi n’a-t-on pas élaboré une LFR (Loi de Finances Rectificative) ?
Harijaona Andriamoraniaina (HA) : Le fait de ne pas faire de LFR signifie qu’il n’y a pas de réajustement important dans la mise en œuvre de la LFI (Loi de Finances Initiale). On élabore généralement une LFR quand le contexte socio-économique du pays change fortement, ce qui entraîne des modifications dans la manière de concevoir la loi de finances. Si on n’a pas introduit de LFR cette fois-ci, c’est que l’exécutif peut encore mettre en œuvre son programme tel qu’il l’a inscrit dans la LFI, et que cela ne transgresse pas les règles de l’orthodoxie budgétaire. C’est-à -dire qu’il n’y a pas de dépenses excessives par rapport aux lignes budgétaires prévues, ni de nouvelles dépenses non prévues dans la LFI exécutées sans l’avis du Parlement.
Selon moi, cela veut dire que l’exécution budgétaire ne va pas trop s’éloigner de ce qui est inscrit dans la LFI.
SS : Mais qu’en est-il des accords signés lors de la visite de Macron et du sommet de la COI ?
HA : Il faut d’abord identifier les programmes concernés. Beaucoup d’enveloppes budgétaires ne mentionnent que des montants globaux sans entrer dans les détails. On peut encore y intégrer certains éléments (détails supplémentaires). C’est surtout lors de l’exécution de la loi de finances qu’on peut voir que plusieurs lignes restent encore trop générales. Ce qu’il faut suivre, c’est si ces accords peuvent s’insérer dans les lignes existantes ou s’ils vont devenir des dépenses extrabudgétaires. C’est là un problème récurrent : certaines dépenses sont exécutées en dehors du budget voté, sans consultation du Parlement.
SSÂ : Est-ce courant de ne pas faire de LFR ?
HA : Dans le cadre de l’orthodoxie budgétaire, la LFR reste une situation d’exception. Nous, on a juste pris l’habitude d’en faire systématiquement, alors on s’étonne dès qu’il n’y en a pas. Pourtant, puisque la LFR sert à rectifier, cela suppose qu’on a mal conçu la première loi. Si on rédige bien la LFI dès le départ, on n’a plus besoin de LFR. C’est même ce recours systématique à la LFR qui est considéré comme un échec dans la planification budgétaire d’un pays.
SS : Cela signifie-t-il que la LFI actuelle est bien conçue ?
HA : Pour le moment, on n’a pas encore suivi de près l’exécution budgétaire, mais si l’on se réfère au suivi réalisé auparavant, on peut constater quelques progrès dans le contenu et le niveau de détail. Néanmoins, cela reste insuffisant. On est encore loin des standards qu’il faudrait atteindre.
SS : Comment peut-on intégrer ces accords extrabudgétaires ?
HA : En principe, les élus du Parlement doivent contrôler ce processus.
SS : Quels sont les impacts positifs ou négatifs de l’absence de LFR ?
HA : Cela dépend des objectifs visés. Si ce qu’on veut faire s’éloigne beaucoup du cadre budgétaire fixé par la LFI, et qu’on ne fait pas de LFR, alors on s’écarte des bonnes pratiques de gestion. En effet, si l’exécution s’éloigne trop de la LFI, on doit normalement faire une LFR. Mais si les actions prévues restent cohérentes avec la ligne budgétaire prévue par la LFI, à quoi bon ?
Propos recueillis par Ravo Andriantsalama