L’ouverture progressive vers une clientèle nouvelle, notamment en provenance des pays arabes, fait partie des leviers pour dynamiser le secteur touristique à Madagascar. Un tournant amorcé depuis l’ouverture de la ligne aérienne directe reliant Madagascar à Dubaï l’année dernière. Actuellement, six vols par semaine assurent cette liaison. Quel impact pour le tourisme ? Manitra Randriambololona, président de la Fédération nationale des guides (FNG) nous répond.
Studio Sifaka : Quel impact concret ont ces nouvelles liaisons aériennes entre Dubaï et Madagascar sur l’activité des tours opérateurs ?
Manitra Randriambololona : La demande en provenance du Moyen-Orient est aujourd’hui en forte hausse. De nombreux tours opérateurs basés à Dubaï souhaitent organiser des eductours ici, car pour eux, Madagascar est une nouvelle destination qu’ils découvrent réellement depuis un an. Ils viennent évaluer sur place le potentiel pour pouvoir mieux vendre la destination chez eux, d’autant plus qu’ils ont désormais un accès plus facile.
On constate aussi une augmentation des demandes individuelles. Pour l’instant, nous n’avons pas encore de statistiques précises mais nous savons que la demande est bien là . Certains visiteurs sont déjà sur place et beaucoup d’autres sont attendus dès le mois d’août.
SS : Nos opérateurs locaux sont-ils prêts à accueillir ce flux croissant de visiteurs ?
MR : Notre objectif est d’atteindre une capacité d’accueil de 11 000 chambres pour pouvoir recevoir jusqu’à un million de touristes en 2028. C’est un processus progressif mais on avance vers cette ambition.
À ce jour, si l’arrivée des touristes suit réellement cette tendance, l’offre d’hébergement reste insuffisante. Nous faisons donc appel à de nouveaux investisseurs pour développer ce volet.
Concernant les guides, nous travaillons déjà à former des nouvelles générations au sein de la Fédération nationale des guides et des tours opérateurs, car les ressources sont encore très limitées, notamment pour l’accompagnement guidé, ce qui est essentiel pour atteindre notre objectif.
SS : Existe-t-il chez nous des guides maîtrisant l’arabe ?
MR : Pour le moment, le traitement des dossiers se fait principalement en anglais, car la majorité des pays arabes qui viennent chez nous sont anglophones. Pour les visiteurs iraniens, on a quelques guides qui parlent le perse, mais ils restent peu nombreux.
Dans la pratique, la plupart des groupes arrivent déjà avec un tour leader qui assure la traduction quand les clients ne maîtrisent pas l’anglais.
SS : Selon vous, quelles devraient être nos priorités pour atteindre nos ambitions ?
MR : Mon message à l’État et à tous les Malgaches : valorisons ce que nous avons. Les visiteurs viennent à Madagascar pour des richesses qu’ils ne trouveront nulle part ailleurs. 5 % de la biodiversité mondiale endémique se trouve ici, chez nous. Si nous donnons de la valeur, ne serait-ce qu’à ces 5 %, Madagascar avancera.
C’est le moment de définir le modèle de tourisme que nous voulons bâtir. Des plages, nous en avons, mais inutile de rivaliser avec d’autres destinations qui proposent déjà plages et hôtels de luxe. Nous devons plutôt capitaliser sur notre biodiversité unique et poser les bases d’un tourisme responsable et durable.
Propos recueillis par Ravo Andriantsalama