Marquée par les cyclones, les incendies et la lenteur des reconstructions, Mananjary vit au rythme des épreuves. Pourtant, la ville des Antambahoaka garde la tête haute, fidèle à sa devise : « Asa fa tsy kabary ». Une mentalité tournée vers l’action, qui nourrit l’espoir d’une renaissance durable.
Une ville qui refuse de plier
Malgré l’assaut du feu et de l’eau, la ville des Antambahoaka plie mais ne rompt pas. Mananjary reste debout, et le slogan de la commune urbaine en dit long sur la mentalité de sa population : « Asa fa tsy kabary », c’est-à -dire privilégier l’action plutôt que les paroles.
À un peu plus de 550 kilomètres au sud-est de la capitale Antananarivo, Mananjary, ville accueillante et chaleureuse, abrite entre 25 000 et 35 000 habitants, dont la plupart appartiennent à l’ethnie Antambahoaka, originaire de cette ville façonnée par les eaux. D’abord par le fleuve Mananjary, qui se jette dans l’océan Indien au sud de la ville. Ensuite par le canal des Pangalanes, qui longe l’entrée urbaine, décorée de petites embarcations reliant Nosy Varika ou d’autres localités situées plus au nord.
Reconstruire après Batsirai
Dès l’arrivée, un constat s’impose : la ville est en reconstruction permanente, comme si un grand cyclone venait de la frapper. Or, le dernier événement climatique majeur fut Batsirai en 2022. Pourtant, les bâtiments publics, les propriétés privées et même la plage, longue de plusieurs kilomètres, restent dans un état préoccupant.
L’exemple du bâtiment abritant le bureau de la Région, car Mananjary est bien le chef-lieu de la région Vatovavy, est révélateur : malgré la présence de dizaines de fonctionnaires, l’édifice demeure fortement dégradé, et certaines parties ne disposent même plus de toit. Trois ans après le passage du cyclone, les séquelles sont toujours visibles.
Le feu, nouvelle épreuve
À cela s’ajoutent les ravages plus récents du feu. En septembre dernier, un incendie a dévasté trois quartiers du centre-ville. En quelques heures, des milliers de personnes ont été sinistrées et des centaines de ménages ont perdu leur foyer. Selon les autorités locales, deux personnes âgées ont trouvé la mort dans ce drame. Plus de trois mois plus tard, les traces du sinistre restent évidentes, et la commune héberge encore des familles qui n’ont pas les moyens de reconstruire.
Pourtant, les autorités locales n’abandonnent pas l’effort de reconstruction. Des travaux de réfection des principales artères sont en cours. Lors du passage de l’équipe de Studio Sifaka en début de mois, les engins et les ouvriers en gilet jaune œuvraient jour et nuit. La question demeure : qu’en est-il des reconstructions de bâtiments publics ? Se préparent-elles enfin ?
Le Sambatra, identité des Antambahoaka
Malgré ses imperfections, Mananjary reste une ville authentique et attachante, où se mêlent nature luxuriante, traditions vivantes et activité agricole, ancrées dans une histoire locale forte. La ville est surtout connue comme un foyer culturel majeur, notamment grâce au rituel du Sambatra, cérémonie traditionnelle de circoncision collective organisée tous les sept ans par l’ethnie Antambahoaka. Ce moment festif attire une foule considérable, venus de tout Madagascar. Tous les sept ans, la ville se transforme en destination touristique, fascinant visiteurs et originaires. Pour préserver cet héritage, les Ampanjaka, aînés spirituels, veillent sur les traditions. Ils dirigent les tragnobe, au nombre de douze dans la seule ville de Mananjary. Ils président également les rituels du Sambatra.
Au final, Mananjary demeure la ville qui a conquis le cœur de Dada Gaby, l’un des plus grands compositeurs malgaches, qui lui a même dédié une chanson intitulée Mananjary, reprise par de nombreux artistes. La version la plus populaire reste celle interprétée par le regretté Fafah du groupe Mahaleo, devenue un tube depuis plusieurs décennies. Le minimum que l’on puisse souhaiter pour Mananjary est qu’elle achève enfin sa reconstruction, afin que ses habitants puissent s’épanouir dans un environnement sain.
Ravo Andriantsalama
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